Brainstorming : Sept paradoxes décapants de philosophes à appliquer au travail

Brainstorming : Sept paradoxes décapants de philosophes à appliquer au travail

 

“Le désordre est de l’ordre”, “le superflu est essentiel”… A rebours des idées reçues, et du bon sens populaire, penseurs et sages nous opposent la force de leurs observations. Pétillant…

 

Sortir du conformisme, penser “out of the box”, c’est ce que nous propose Sophie Chaussat, auteure de “Pourquoi penser comme tout le monde? 50 paradoxes loufoques de philosophes pour voir le monde autrement” (éd. Marabout, 2015). Voici sept exemples commentés.

 

1. Ne pas agir augmente l’efficacité, selon Lao-tseu

Qui n’a jamais voulu forcer son destin, prendre les choses en main? Une attitude loin de l’une des idées centrales du fondateur du taoïsme (Vème siècle av. J.-C.). Cette sagesse chinoise invite à penser l’efficacité, non pas comme le résultat d’une intervention résolue pour infléchir le cours des choses, mais comme l’accompagnement d’un processus naturel, d’une transformation à l’oeuvre. Ne pas agir consiste non pas à se désengager, mais à observer et à repérer le ying et le yang, en mouvement.

Au travail. Identifiez tout le potentiel d’une situation, repérez les forces en présence – opposants/alliés ; avantages/inconvénients -. Imaginez les orientations possibles, même les plus infimes, vous pourrez ensuite agir de manière souple et adaptée.

 

2. Le désordre est de l’ordre, selon Henri Bergson

Le désordre est “l’absence de l’ordre que met consciemment dans sa vie une personne rangée (…)”, écrit le philosophe dans L’Evolution créatrice. Le désordre est en fait l’ordre que nous ne cherchons pas ; il y a de l’ordre dans le chaos. Simplement, celui-là n’est pas celui que nous escomptions, et déçus, nous l’appelons désordre. Un désappointement subjectif!

Au travail. Prenez en considération tout(e) sujet ou idée qui vous semble “foutraque”, il (elle) peut receler des pépites ; acceptez que des collaborateurs (ou vous) aient une façon décousue d’organiser leurs dossiers et tâches.

 

3. Le superflu est l’essentiel, selon Gaston Bachelard

“La conquête du superflu donne une excitation intellectuelle plus grande que la conquête du nécessaire. L’homme est une création du désir et non pas une création du besoin”, écrit le philosophe poète dans La Psychanalyse du Feu. Le feu n’était pas indispensable à l’homme pour sa survie, explique-t-il, mais sa maîtrise de l’élément l’a conduit au bien-être, à la gourmandise, à l’esthétique… et à la spiritualité. Ce sont les instants et les choses superflues qui permettent de magnifier le réel.

Au travail. Ne négligez pas les moments “perdus” à discuter à bâtons rompus avec vos collaborateurs, ni les gestes gratuits. Ils motivent et dopent les neurones. De votre côté, faites-vous plaisir.

 

4. L’ignorance a un côté savant, selon Socrate

Pas facile d’avouer ses lacunes dans un monde rempli d’experts. “Je sais que je ne sais rien”, professait le père de la philosophie occidentale. Ne rien savoir libère le désir, l’appétit de connaitre. Cette “docte ignorance” est alors le point de départ du véritable savoir, lequel doit, pour reposer sur de solides fondations, affronter le vertige du doute.

Au travail. Efforcez-vous de remettre en cause vos certitudes, préjugés, croyances, afin d’accueillir d’autres vérités et de rester ouvert au dialogue ; cherchez à comprendre et à vous cultiver.

 

5. Le bricolage, c’est du sérieux, selon Claude-Lévi Strauss

Faire avec des bouts de ficelle relève de l’amateurisme. Et pourtant ! Cet esprit bricoleur ressemble à la “Pensée sauvage” explorée par le philosophe-ethnologue auprès des “peuples premiers”. A l’inverse de notre pensée domestiquée qui conçoit d’abord, puis cadre le strict protocole d’exécution, la pensée sauvage ne suit aucune règle prédéfinie, et n’assigne aucune fonction précise à des objets de bric et le broc qui peuvent tout devenir. Quand on leur donne du sens.

Au travail. Laissez libre cours à votre créativité, prenez des chemins de traverse, vous allez innover, et/ ou enrichir le projet. Et agissez avec les moyens du bord, quand les ressources manquent. Ce sera différent mais aussi solide.

 

6. Mentir n’est pas juste un vilain défaut, selon Benjamin Constant

Dire la vérité est un devoir, reconnaît le philosophe, mais un devoir n’existe que là où il y a un droit réciproque. En clair, si votre interlocuteur n’a pas droit à la vérité, vous n’aurez aucun devoir de vérité.

Au travail. Autorisez-vous à mentir, envers des gens qui ne le méritent pas : les mal intentionnés, les médisants, les retors, etc.

 

7. Les apparences ne sont jamais trompeuses, selon Merleau-Ponty

A contre-courant de l’adage, le phénoménologue assure que la perception d’un objet ou d’un individu suffit pour accéder à son “style”. Chacune de ses apparences révèle un aspect de la réalité, et chacune d’elles dit la vérité. A vous de croiser vos perceptions, et de les confronter avec celles des autres. Ainsi, d’esquisse en esquisse le tableau se dessine.

Au travail. Face à un tiers – client, visiteur, candidat – ou à un événement, fiez-vous à votre première impression, sachant que celle-ci restera à compléter et à affiner par d’autres intuitions ou sensations.